Synthèse d'article scientifique produite par la Fondation Descartes de :
Altay, S. Hacquin, A-S. Mercier, H. (2020). “Why do so few people share fake news ? It hurts their reputation”. News media & society
Cet article, qui regroupe quatre études expérimentales, montre que les individus évitent généralement de partager des fake news de manière volontaire, par crainte que leur réputation ne s’en trouve affectée.
Selon les auteurs de l’article, la littérature récente montrerait que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, la proportion de fake news en circulation sur Internet est relativement faible. Si les fake news s’avèrent attractives de par leur contenu, elles n’en restent pas moins dommageables pour la réputation des médias qui les produisent et des personnes qui les partagent : le faire conduirait à perdre la confiance des autres et à être perçu comme incompétent. Supposant que la confiance est plus facilement perdue que gagnée, Altay, Hacquin et Mercier font l’hypothèse que les individus et les médias se montreraient dès lors attentifs à ne pas diffuser volontairement de fake news, afin de préserver leur réputation.
La première expérience conduite par les auteurs de cet article montre que les médias qui partagent des fake news voient effectivement leur réputation se détériorer fortement. De plus, leur réputation reste négative même lorsqu’ils partagent par la suite des informations correctes. Dès lors, si la réputation d’un média peut rapidement se détériorer, elle ne s’améliore par contre que difficilement aux yeux des participants.
La seconde étude montre que lorsqu’un média partage des fake news, sa réputation se détériore aux yeux des participants même si les fake news en question sont en adéquation avec leurs valeurs politiques. Autrement dit, la réputation d’un média dépendrait davantage de la fiabilité des informations qu’il publie que de leur orientation idéologique.
Les deux dernières études montrent que les participants sont eux-mêmes réticents à l’idée de partager volontairement des fake news. Altay et ses collègues l’ont établi en demandant aux participants d’indiquer la somme contre laquelle ils seraient prêts à partager sur les réseaux sociaux des informations qui leur étaient soumises par les chercheurs. Parmi ces informations, certaines étaient manifestement fausses. Résultat : les participants se dirent disposés à partager ces informations fausses contre une somme nettement plus élevée que celle contre laquelle ils auraient été prêts à partager les autres informations. Autre fait intéressant, les participants se dirent moins réticents à l’idée de partager des fake news s’il leur était possible de le faire de manière anonyme. Seule une minorité d’entre eux (moins de 30%) aurait ainsi accepté de partager des fake news gratuitement sur leur compte personnel. L’attention que les individus portent à leur réputation semble donc jouer un rôle de garde-fou dans la transmission de fake news.
Ces résultats vont dans le sens d’autres études affirmant qu’une minorité de la population est responsable de la diffusion de la majorité des fake news sur les réseaux sociaux. Cette minorité partagerait des fake news pour différentes raisons. Il se pourrait notamment que ces personnes ne se rendent pas compte que ces informations sont fausses, ou alors, elles jugeraient que la nature de ces fake news ne devrait pas trop porter préjudice à leur réputation.